CAS D’ÉTUDE

L’Odorat

1749

Titre L’Odorat
Lieu de conservation Versailles, Musée national des châteaux de Versailles et de Trianon (MV 6227)
Datation 1749
Signature En bas « JB. Oudry 1749 »
Dimensions 144 x 66 cm
État conservation support Rentoilé
Couleur de la préparation Rouge
Nature liant couche picturale
Nombre d’interventions /

restaurations recensées

Au moins 3
Analyses physico-chimiques non
Photographies disponibles 10 photographies en lumière réfléchie

1 photographie en lumière rasante

2 photographies sous lumière infra-rouge dont 1 fausse couleur

1 photographie sous lumière ultra-violette

1 radiographie (non numérisée)

Contexte commande

 

L’Odorat fait partie d’un ensemble de cinq tableaux traitant des cinq sens. Le cycle fut exécuté en 1749 pour le cabinet intérieur des appartements de la reine Marie Leszczynska. La commande fut payée 2500 livres (Engerand, 1900, p. 360). L’ensemble fut probablement retiré de la pièce lorsque Marie-Antoinette en modifia le décor.

 

Description iconographique et œuvres en lien

 

Peints pour décorer une pièce sans fenêtre, les paysages des Cinq sens se démarquent par leur luminosité et par la clarté des couleurs employées. L’artiste exploite le thème de la cueillette des fleurs afin d’illustrer l’odorat. Au centre, une jeune aristocrate respire le parfum d’une fleur qu’elle porte à son visage. Debout à côté d’elle, un paysan lui tend une corbeille remplie de fleurs. À ses pieds, une autre jeune femme compose un bouquet qu’elle place dans un panier. Cette évocation est tributaire de la peinture galante : les fleurs et leur parfum sont en effet fréquemment associées à la jeunesse féminine, tandis que la fleur glissée dans le corsage de la jeune femme est un symbole de séduction. Enfin, le choix de mettre en scène des figures de petite taille au sein de paysages lumineux s’explique par les conditions particulières de la commande. Dans un premier temps, sur le conseil de Coypel, elle est confiée à Jean-Baptiste-Marie Pierre (Engerand, 1900, p. 395-396). En mars 1749, Lenormant de Tournehem, le Directeur des Bâtiments du Roi, informe Pierre des exigences de la Reine : quatre tableaux devront traiter des quatre saisons et le dernier figurera une veillée au village. Dès le mois de mai de la même année, les cinq tableaux prennent place dans le cabinet. Ils sont enlevés six mois plus tard, Marie Leszczynska jugeant les figures trop fortes pour un lieu aux dimensions si réduites. (Les Quatre saisons de Pierre se trouvent aujourd’hui à Fontainebleau, Inv. F. 2005.1-4. La Veillée au village est considérée comme disparue). C’est alors qu’Oudry hérite de la commande et réalise l’ensemble des cinq panneaux sur le thème des cinq sens, qui sont achevés dès la fin du mois de novembre 1749.

Parcours patrimonial

 

Documenté à partir du dossier d’œuvre du musée national du château de Versailles MV 6227).

NB : Même si nous ne disposons de peu d’informations sur les restaurations et interventions passées et antérieures au XXe siècle, il est possible de retracer le parcours des œuvres. Il est intéressant de noter que les cinq panneaux ont été conservés ensemble et partagent en grande partie la même histoire matérielle.

 

Les cinq tableaux sont mentionnés en 1784 en réserve dans les magasins de la surintendance à Versailles (Louis Durameau, Inventaire des tableaux du Cabinet du Roi, placés à la Sur-Intendance des Batimens de Sa Majesté à Versailles, fait en l’année 1784 par l’ordre de Monsieur Le Comte d’Angiviller […], Tome second, BCMN MS 31, p. 12). Au XIXe siècle, ils sont localisés à la Manufacture de tapisseries de Beauvais dans l’inventaire Frédéric Villot. Vraisemblablement, ils servent de cartons pour des feuilles de paravent et sont modifiés afin d’être mis au rectangle (à l’origine, ils étaient encastrés dans la boiserie de la pièce et étaient cintrés, 146 (ou 149) x 79 cm).  Au début du XXe siècle, les tableaux sont localisés dans les mansardes de la Manufacture de tapisseries de Beauvais.

 

Le 21 novembre 1935, le Comité de la Manufacture des Tapisseries de Beauvais décide son envoi. Les cinq panneaux sont déposés à Versailles.

Dans une lettre du 18 mars 1935, la direction du Musée de Versailles atteste l’intention de replacer les Cinq sens dans les cabinets de Marie Leszczynska, avec la copie de la Ferme.

En 1936, ils sont accrochés dans le petit salon de repos de Marie-Antoinette, à côté de la Ferme de Marie Leszczynska (copie d’après Oudry). (La Revue de l’Art ancien et moderne, dir. André Dezarrois, Paris, 3e période, t. LXX, n° 372, juillet 1936, p. 115)

 

En 1959, la fiche de santé le localise à l’époque dans les petits appartements de la reine, dans la Chambre des Bains.

 

En 1982-1983, l’Odorat est exposé lors de la rétrospective « J.-B. Oudry, 1686-1755 », Paris, Galeries nationales du Grand Palais, 1er octobre 1982-3 janvier 1983 (n° 141, p. 248-249).

 

En 1987, les cinq panneaux sont en réserves.

Les étiquettes au revers du panneau indiquent que l’Odorat aurait participé à l’exposition Splendors of Versailles, Missipi Ars Pavillon (1er avril-31 aout 1998).

En 2011, les cinq panneaux sont présentés dans l’exposition « Parler à l’âme et au cœur. La peinture selon Marie Leszczynska », château de Fontainebleau, 18 juin-19 septembre 2011 (n° 7 à 11).

En 2013-2014, les Cinq sens sont exposés dans « Le Versailles de Marie Leszczynska. L’art à la cour de France au XVIIIe siècle », [château royal de Varsovie, 20 septembre 2013-5 janvier 2014 (n° 86 à 90)].

2015-2016 : L’Odorat est présenté dans l’exposition « Dansez. Embrassez qui vous voudrez. Fêtes et plaisirs d’amour au siècle de Madame de Pompadour », [Louvre-Lens, 5 décembre 2015-29 février 2016 (n° 110, p. 184)].

 

 

Constat d’état de conservation

 

Le support en toile original est rentoilé à la colle de pâte sur une toile de lin. Le support secondaire présente une armure toile (24 x 18 fils cm²), au tissage serré, irrégulier avec des nœuds, semblable à celui observé pour le Goût.

Les quatre angles sont incrustés de toile [voir onglet restauration]. On note deux anciens accidents au niveau du support : une lacune à dextre, dans le quart supérieur, et une ancienne déchirure dans le feuillage à senestre.

La couche picturale présente un bon état de conservation général malgré quelques lacunes ponctuelles. Un réseau de craquelures d’âge couvre le ciel et le paysage. On note également la présence d’un réseau de craquelures au niveau des barres de châssis.

 

Examen technologique

 

À ce jour, les informations présentées reposent sur l’exploitation exclusive des rapports de restauration. Une phase d’étude du cycle des Cinq Sens est programmée.

Le support original en toile se compose d’un lé unique. Il présente une armure-toile (11 x 14 fils au cm²). On suppose qu’à l’origine le bord supérieur présentait une forme chantournée. La forme initiale de la partie inférieure n’a pu être déterminée. La toile est tendue sur un châssis à clé, en croix, non original.

Les sources écrites signalent deux interventions fondamentales sur le support au XIXe et au début du XXe siècle.

 

Au cours du XIXe siècle, lorsque les tableaux se trouvaient à Beauvais, les cinq panneaux ont été agrandis et mis au rectangle. Ce changement de format a occasionné des repeints. De plus, dans le catalogue de la rétrospective Oudry (Opperman H., Rosenberg P., 1983, p. 249), l’auteur mentionne le rentoilage et la restauration des peintures intervenues au début du XXe siècle, sans préciser sa source. On ignore la date précise de ces interventions.

 

Par ailleurs, l’étude matérielle des œuvres conduite par les restauratrices lors de la dernière restauration (2013) confirme que deux interventions importantes sur le support ont été réalisées par le passé. En partie supérieure, trois morceaux de toile ont été incrustés. Les pièces de toile rajoutées présentent un tissage lâche, d’une armure toile (10×12 fils cm²), plus fin que celui de la toile originale. Cette intervention est similaire à celle observée sur le Goût et le Toucher. La partie basse a été modifiée au moins deux fois. D’après Chantal Bureau, l’examen des radiographies confirmerait la succession de ces deux interventions. Une première intervention aurait permis un retour à une forme chantournée avec une incrustation de toile de biais et non dans le droit fil. Une seconde intervention a permis un retour à un format rectangulaire. Contrairement à ce qui a été observé sur le Goût, il s’agit ici d’incrustations en toile.

 

Le rapport de Marie Lauzon rend également compte de deux campagnes de retouche ou repeints qui ont pu être différenciées de par la touche et leurs paramètres de solubilités. La plus ancienne est notamment présente sur les joints des agrandissements chantournés. Leur solubilité sous l’action du mélange (acétate d’éthyle/ DMSO) indiquerait un liant huileux. Cette intervention pourrait être rapprochée de la première intervention en support identifiée. La seconde campagne de retouche, plus légère dans la touche, soluble dans un mélange (ligroïne/éthanol) se concentre en partie inférieure et a permis l’intégration des incrustations du format rectangulaire.

 

En 2013, l’intervention sur le support toile de Chantal Bureau a consisté en la dépose de la toile, le collage de bandes de tension et la consolidation de la couche picturale avec une colle d’esturgeon (3% dans l’eau). Marie de Lauzon est intervenue sur la couche picturale. Une fois le tableau nettoyé de ses couches de vernis et des repeints, la restauratrice a procédé au comblement des lacunes, au vernissage (résine dammar) et à la réintégration colorée des manques (Gamblin).

Louis Durameau, Inventaire des tableaux du Cabinet du Roi, placés à la Sur-Intendance des Batimens de Sa Majesté à Versailles, fait en l’année 1784 par l’ordre de Monsieur Le Comte d’Angiviller […], Tome second, BCMN MS 31.

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/idurl/1/7149 [consulté le 17 janvier 2019].

 

Fichier C2RMF 72182 

Rapport d’intervention de restauration

– sur le support de Chantal Bureau (n° 27172).

– sur la couche picturale de Marie de Lauzon (n° 27246).

 

Documentation photographique

 

– laj1275, lumière réfléchie après intervention, Jean-Yves Lacôte

– MAA1857, lumière réfléchie fin d’intervention, Anne Maigret

– MAA1858, lumière réfléchie fin d’intervention, Anne Maigret

– dug2463, lumière réfléchie en cours d’intervention, Gérard Dufrêne

– clt4845, lumière réfléchie en cours d’intervention, Thomas Clot

– laj1034, lumière réfléchie en cours d’intervention, Jean-Yves Lacôte

– laj1035, lumière réfléchie en cours d’intervention, Jean-Yves Lacôte

– CLL563, lumière réfléchie, étude, Laurence Clivet

– CLL564, lumière infrarouge, niveaux de gris, Laurence Clivet

– CLL680, lumière infrarouge fausses couleurs, Laurence Clivet

– CLL681, lumière rasante droite, couleurs, Laurence Clivet

– CLL682, fluorescence UV, couleurs, Laurence Clivet

– CLL683, revers, lumière réfléchie, Laurence Clivet

– CLL684, lumière réfléchie, détail, Laurence Clivet

– rx12713, radiographie rayons X, Gérard de Puniet de Parry (non numérisée)